dimanche 19 juin 2011

La Marche des Fiertés à Lyon : qui est fier de quoi?

Hier à Lyon a eu lieu la Marche des Fiertés, anciennement la Gay Pride, une manifestation pour la défense des droits des lesbiennes, des homo-, bi- et transsexuels. J'y ai assisté avec le collectif d'Osez le Féministe 69, car qui dit l'égalité des droits, dit l'égalité pour tout le monde. L'idée est de soutenir les LGBT dans la lutte contre les préjugés et les stéréotypes liés à la sexualité. Nous avons tous le droit d'aimer qui on veut, comment on veut et quand on veut.

Je ne suis jamais allée à une manifestation de ce genre, car j'avoue, moi aussi, j'avais des préjugés. Et la première place dans le palmarès a longtemps été attribué à la peur de l'autre, cette peur inconsciente de la différence affichée au grand jour par les moyens vestimentaires ou les comportements inadéquats. La peur de la violence également, que ce soit de la part des manifestants ou de leur opposants. Car si la Gay Pride à Lyon ressemble bel et bien à une parade festive, ce n'est pas le cas par exemple à Moscou ou à Bucarest. La-bas, ça finit en général au poste de la police avec des menottes pour tous les groupes confondus ou par le passage à tabac des minorités concernées. Pas facile la vie d'un homosexuel dans des pays où leurs pratiques sexuelles sont considérées comme une déviance mentale.

Depuis quelques temps déjà je m'intéresse beaucoup au mouvement féministe "Osez le Féminisme" et j'ai vu dans la Gay Pride un moyen de voir le groupe en action par le biais de leur antenne locale. Ainsi, la Marche a-t-elle été un baptême de feu pour moi en tant que féministe. Enfin, une féministe débutante. Car si je partage la plupart de leurs idées et prises de parole, je ne me sens pas encore prête à me lancer dans le militantisme assidu. Cela dit, j'ai rejoins le petit groupe d'OLF 69 et pense m'y être bien intégrée.

Si vous n'avez jamais mis les pieds à une manifestation, voici les règles de base : 
  • On se rassemble dans un lieu précis 2-3 heures avant la manifestation même pour se préparer (se déguiser, se maquiller, boire un verre ou deux)
  • On apporte des drapeaux, des banderoles, des tracts et des affiches ou on achète tout sur place chez les vendeurs ambulants
  • On vient avec des amis, des collègues, ou des simple connaissances, plus on est nombreux, plus on rigole
Arrivée sur les lieux, j'ai eu le plaisir de voir tous les groupes en pleins préparatifs. Il y avait le Collectif Lesbien Lyonnais, le PS, le groupe qui prônait le dépistage de SIDA, et surtout beaucoup de jeunes qui affichaient fièrement leur drapeau arc-en-ciel. Des gays, et des lesbiennes de tous les âges et de toutes les couleurs de peau se tenaient par la main ou s'embrassaient dans la foule. La musique électro était omniprésente, et à chaque stand sa musique, s'il vous plaît. On ne mélange pas la Britney Spears du PS aux sons house du Scoop Radio. Enfin, mais qu'est-ce qu'elle faisait là, Scoop Radio? Ah oui, de la pub. J'ai oublié à quel point les partis politiques et les radios locales étaient touchés par la cause des LGBT. Un camion entier a été alloué pour la manifestation avec des DJ qui criaient des slogans toutes les 10 minutes pour exciter la foule. Avec une DJ en soutif sur le fond de ses collègues en t-shirt. No comments.

En parlant des LGBT mêmes, l'image idyllique des gays et lesbiennes se tenant par la main a été vite remplacée par des images des collégiens et des lycéens se tenant à peine debout après quelques verres d'alcool. Des filles ultra maquillés âgées de 13-14 ans défilant "gaiment" avec des garçons à moitié à poil couverts de drapeaux multicolores, une bière à la main. Un bus avec deux barres latérales sur lesquelles étaient accrochés des ados déchainés, scandant des olé-olé à tout va, sans oublier de tout filmer sur leurs smartphones. La Marche des Fiertés alors? Fierté de quoi au juste? A un moment donné, j'ai eu l'impression de se retrouver dans le mauvais tronçon de la marche, car tous les représentants du mouvement demeuraient en effet sur les côtés le long des trottoirs et nous contemplaient sans trop d'émotions. Certes, ils affichaient clairement et fièrement leur sexualité au public, ce jour-là ils avaient le droit après tout, mais à mon avis, le soutien des jeunes leur paraissaient peu convainquant. La liberté d'expression gagnée au prix d'une rave-party, pas de quoi être fier. Il est vrai que les jeunes zombies derrière le bus techno crachant de la mousse ce n'est pas vraiment à quoi je m'attendais pendant la Gay Pride. Est-ce que seulement ils sont conscients de la cause qu'ils défendent? En fin de compte, je comprends mieux la présence dans la marche d'un petit garçon avec un petit drapeau arc-en-ciel dans les bras de sa maman lesbienne que les hordes des écoliers qui sont venus là uniquement pour faire la fête. Sommes-nous obligés de passer par l'appât d'une fête gratuite pour remplir le cortège? Ou suis-je trop pessimiste à l'égard des jeunes qui se sentent capable de soutenir la cause aussi sérieuse que l'égalité des droits sans qu'on les attire avec une carotte? Parce qu'à la fin de la fête, ils vont tranquillement rentrer chez soi et oublier leur pseudo-engagement tandis que les milliers de gays et lesbiennes seront de nouveau confrontés aux inégalités et aux préjugés sexistes jusqu'à une nouvelle Marche.

Malgré une certaine déception sur les vrais enjeux de la manifestation, l'expérience d'une Gay Pride a été bénéfique pour mon engagement féministe. J'ai rencontré des personnes qui bossent pour l'OLF 69 et malgré leur jeune âge, j'ai été agréablement surprise de leur enthousiasme et motivation. J'ai une grande envie de suivre leur combat l'année prochaine, mais je reste néanmoins sceptique en ce qui concerne mes capacités politiques. Affaire à suivre donc.






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